A l’occasion d’un salon de céramique à l’été 1946, Pablo Picasso fait la connaissance des deux initiateurs de l’atelier Madoura, Suzanne et Georges Ramié. Cette rencontre marque le début d’une longue collaboration qui s’étendra sur 25 ans. L’atelier fondé en 1938 par Suzanne Ramié participe alors au renouvellement de l’artisanat en s’installant comme d’autres talentueux céramistes de la même époque à Vallauris. Madoura connait un essor considérable, les clients sont séduits par la qualité et la nouveauté de la production. Picasso est également sous le charme et s’intègre très naturellement au sein de cette structure toujours restée familiale. La formation libre dont est issue Suzanne Ramié fait d’elle une oreille particulièrement attentive à l’originalité créative de Picasso, un véritable dialogue se noue entre les deux artistes. C’est au côté de Suzanne que Picasso apprend la technique et le vocabulaire des arts du feu. Ils vont très rapidement s’influencer et expérimenter ensemble une large palette de formes et d’inspirations, en passant de la création d’animaux fantastiques au répertoire antique, revisitant ainsi les anciennes civilisations par la modernisation de leur imagerie formelle. L’atelier est à la disposition de Picasso qui décide de mettre en place une édition de ses propres pièces. Ce surcroit de travail permet néanmoins d’amplifier considérablement le rayonnement de l’atelier. De grands artistes viennent alors réaliser des pièces dans l’enceinte de Madoura comme Matisse, Marc Chagall ou encore Victor Brauner. Cette collaboration permet à Picasso de concrétiser un désir de longue date en créant des multiples de ses pièces, mais également, grâce au soutien indéfectible de Suzanne Ramié, de libérer la discipline en imprégnant durablement la céramique moderne et contemporaine.