
Née en 1894 à Chartres sous le nom de Marie-Madeleine Marcelle Magistry, Madeleine Castaing grandit dans une famille aisée : son père, ingénieur, participa à des projets publics — un environnement qui lui donna accès à l’éducation et à un cadre cultivé.
Adolescente, elle croise le chemin de Marcellin Castaing, critique d’art toulousain d’une vingtaine d’années son aîné, qu’elle épouse très jeune — la légende veut qu’elle ait été « enlevée » par lui tant leur rencontre fut marquante.
Dans les années 1920, elle entame une carrière d’actrice dans le cinéma muet, où elle est un temps surnommée la « Mary Pickford française ». Mais le cinéma ne retiendra pas son âme créative bien longtemps.
Son mari lui offre une gentilhommière néoclassique dans le village de Lèves (près de Chartres), une maison qu’elle rêve d’habiter depuis l’enfance. C’est là qu’elle découvre sa véritable vocation pour la décoration d’intérieur.
Progressivement, Madeleine transforme sa maison en un décor vivant — mélangeant mobilier ancien, objets d’art, tissus, couleurs et souvenirs — un travail d’une créativité sans concession, où le goût, l’audace et l’émotion priment sur les conventions.
Pendant l’Occupation, alors que la maison de Lèves est réquisitionnée, elle ouvre à Paris une galerie-boutique d’antiquités. Cette adresse devient un lieu mythique — rue Jacob / rue Bonaparte — véritable laboratoire de style où elle assemble meubles anciens, tissus, papiers peints, tapis, objets divers, comme un peintre compose un tableau. Elle disait : « Je ne suis pas antiquaire — je suis marchande d’atmosphères. »
Très vite, son goût singulier — audacieux, éclectique, tropicalisant, avant-gardiste — s’impose. Elle marie sans complexe mobilier Louis XVI, meubles Napoléon III, trésors « hors-mode », tapis profonds, imprimés animaliers, tissus luxuriants. Elle impose un vocabulaire décoratif nouveau, libre, sensible — que l’on appellera bientôt le « style Castaing ».